Aujourd’hui, je reviens pour parler théâtre. J’aime le théâtre sous toutes ses formes, en tant que comédienne, en tant que spectatrice et en tant que lectrice. Avec la sortie de Harry Potter and the Cursed Child, je me suis rendue compte que beaucoup de gens n’avaient pas l’habitude de lire du théâtre. Même si le théâtre est fait pour être vu et entendu, on peut découvrir de véritables pépites en lisant certaines pièces. J’ai choisi de vous conseiller trois pièces de théâtres contemporains, bien loin des pièces de théâtre que vous avez dû être forcé de lire au lycée. Si vous avez du mal à rentrer dans l’histoire lorsque vous lisez une pièce, je vous conseille d’essayer de lire à haute voix, seul ou à plusieurs si il y a plusieurs personnages. Je vous recommence également d’emprunter à votre bibliothèque plutôt que d’acheter les ouvrages car en général ils coûtent plutôt cher.
Chroniques des jours entiers, des nuits entières de Xavier Durringer – 1996
Cette pièce, c’est un dialogue entre plusieurs personnages : jeunes, français, de classe moyenne voir de milieux modestes. Ils n’ont pas réussi leur vie mais ils ne sont pas malheureux pour autant, il y a un couple qui se disputent sans arrêt, un célibataire désespéré, deux « voyous » voleurs de piano … Le talent de Durringer, dramaturge, metteur en scène et réalisateur, réside dans son écriture. Le style est vif, les répliques fusent et les longs monologues sont rythmés. Les personnages, reflet d’une certaine jeunesse française qui s’ennuient et qui ne trouvent pas sa place, ne brillent pas par leur intelligence ou leurs bonnes actions mais on ressent la profonde tendresse qu’éprouve pour eux leur créateur.
Si on enlève toutes les heures inutiles, toutes les heures qu’on a passé à se laver, à manger, à boire, à aller faire les courses, à préparer à manger, à mettre la table, à regarder la télé, à travailler, à partir travailler, à revenir, à être sur les routes, entre deux endroits, deux trains, deux appartements, à dormir.
Qu’est-ce qui me reste ?
4.48 Pychose de Sarah Kane – 2000
Sarah Kane est une dramaturge britannique qui s’est suicidée à l’âge de 28 ans en 1999. Cette pièce, sa dernière, est un long monologue d’une femme hospitalisée à cause d’une sévère dépression, maladie dont Sarah Kane souffrait. Ce texte, entre la fiction et l’autobiographie sous forme de théâtre, a été un véritable coup de poing pour moi. Sa lecture est très éprouvante physiquement, j’ai vraiment ressenti la douleur et la détresse du personnage. Ce monologue s’approche de la poésie en vers libres car l’écriture de Kane est très majestueuse bien que violente et crue et la mise en page n’est pas la même qu’une pièce de théâtre classique, l’auteur joue avec la ponctuation et les espaces. Lors de la première représentation de la pièce en France, c’est Isabelle Hubert qui a interprété le texte, j’aurai tellement aimé voir cette mise en scène !
Si on enlève toutes les heures inutiles, toutes les heures qu’on a passé à se laver, à manger, à boire, à aller faire les courses, à préparer à manger, à mettre la table, à regarder la télé, à travailler, à partir travailler, à revenir, à être sur les routes, entre deux endroits, deux trains, deux appartements, à dormir.
Qu’est-ce qui me reste ?Parfois je me retourne et retrouve votre odeur et je ne peux pas continuer je ne peux pas continuer putain sans exprimer ce terrifiant ah putain cet effrayant ce blessant putain de besoin physique que j’ai de vous. Et je ne peux pas croire que je peux ressentir ça pour vous et que vous, vous ne ressentiez rien. Vous ne ressentez rien ?
Silence.
Vous ne ressentez rien ?
Silence.
Cendrillon de Joël Pommerat, 2011
Pour finir sur une note plus légère, parlons réécriture de conte. Joël Pommerat est un des dramaturges et metteurs en scène français les plus connus de sa génération. Pour être honnête, je ne connais pas l’ensemble de son travail mais depuis quelques années il s’amuse à monter des spectacles transposant des contes classiques dans une époque plus contemporaine. Après Le Petit Chaperon Rouge et Pinnochio, il s’est donc attaqué à Cendrillon qui devient dans la pièce Sandra. Cette réécriture est surtout centré autour du thème du deuil et plus précisément de la culpabilité d’être encore en vie quand un de ses proches n’est plus là car la jeune fille doit remonter la pente après le décès de sa mère alors que son père est bien décidé à refaire sa vie. La morale de l’histoire est donc tout autre que celle du conte original. De plus, la pièce est très poétique et si on la lit sans jamais avoir vu la scénographie du spectacle, il est plaisant de s’imaginer le décor et les costumes avec les didascalies (la maison de la belle-mère est en verre, Sandra a en permanence une horloge autour de son cou pour ne pas oublier de penser à sa mère …).
La très jeune fille :
Je crois que des fois dans la vie, on se raconte des histoires dans sa tête, on sait très bien que ce sont des histoires, mais on se les raconte quand même.
C’est plus difficile de parler de pièces de théâtre à lire que je le pensais ! Je n’ai vu aucune mise en scène des oeuvres dont je vous parle et je crois qu’il est plus facile de parler de théâtre en tant que spectatrice qu’en tant que lectrice. Si le théâtre vous intéresse dites le moi dans les commentaires, je pourrai faire un article sur des spectacles qui m’ont marqué ou sur ma pratique personnelle du théâtre!